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Projet de résolution sur les leçons politiques de l’expérience grecque
Nous avons proposé cette résolution, issue de la contribution P5 et de la contribution A&R parue dans le bulletin de discussion. Nous regrettons qu'A&R ne l'ait pas acceptée.
Tous les militantEs et organisations anticapitalistes doivent tirer les leçons de l'expérience grecque, de la faillite, de la trahison et de l’escroquerie de Syriza. Il ne s’agit pas simplement de condamner l’accord du 13 juillet, mais de comprendre pourquoi la politique de Syriza a mené à ce résultat. En effet, des mouvements et partis du type de Syriza existent dans d'autres pays d'Europe, et des gouvernements de ce type pourraient émerger dans les prochains mois. Cette trahison de la lutte du peuple grec était inscrite dans la trajectoire de Syriza, sa campagne électorale, le gouvernement avec ANEL, l'installation dans l’État bourgeois, le respect de l'UE et des institutions du capitalisme, la signature de l’accord cadre du 20 février, le maintien dans l'OTAN, l'accord avec Israël, etc. Syriza n'a rien fait pour la mobilisation de la population et de la classe ouvrière contre la Troïka. L’issue est donc tout sauf une surprise.
Le programme de Syriza contenait bien sûr beaucoup de revendications justes contre l’austérité et proclamait son opposition à la Troïka. Mais faute de vouloir rompre avec le capitalisme et ses institutions (nationales et européennes), faute de vouloir mobiliser la classe ouvrière et la jeunesse, il se condamnait à appliquer les mêmes politiques que les libéraux. L’expérience des six derniers mois a montré concrètement l’impasse totale dans laquelle se trouvent les antilibéraux.
Il est essentiel, en solidarité avec les anticapitalistes grecs, que nous popularisions une voie alternative, qui articule, de façon indissociable, rupture avec le capitalisme et rupture avec l'UE, en expliquant que seule une mobilisation puissante de notre classe pourra l’imposer. Car l'austérité n'est pas une fatalité et notre classe a besoin de perspectives, de la conviction qu’une alternative existe, pour se mobiliser et ne pas sombrer dans le fatalisme et le désespoir qui nourissent l’extrême droite.
Pour tout gouvernement qui voudrait rompre avec l’austérité, il n'y a pas de troisième voie entre la rupture avec l'UE et la soumission à la Troïka. On ne peut pas désobéir à l'UE, prendre des mesures unilatérales, et rester dans le cadre de l'Europe de la bourgeoisie. Ainsi, soit on obéit à la BCE, soit on reprend le contrôle de la monnaie, et dans ce cas la rupture est immédiate. Il faut combattre les illusions sur une possible réforme de l’UE ou sur la possibilité de mettre en place des monnaies complémentaires à l’euro.
A l'aune de l'expérience grecque, il est donc aujourd'hui impossible d'esquiver la question de notre rapport à l'Union européenne et à sa monnaie. La rupture avec l'UE et l'euro doit être intégrée à notre programme anticapitaliste. C'est une condition nécessaire et bien sur pas suffisante pour rompre avec l'austérité. La sortie de l'euro n'est pour nous ni une solution en soi, ni un fétiche à agiter de façon isolée, ni une première étape avant une éventuelle seconde étape anticapitaliste. La rupture avec l'UE est avant tout un appel à la lutte commune de la classe ouvrière et des peuples de l'Europe, pour une Europe des peuples et des travailleurs. Nous n'opposons pas la mauvaise Europe et le bon État national, le mauvais euro et la bonne drachme capitalistes. La rupture avec l'euro dans un cadre capitaliste est une impasse. Il n'y a pas de solution keynésienne nationale à la crise. Nous défendons un projet de rupture anticapitaliste avec l'UE qui articule la nécessité de rompre avec l'UE avec l'ensemble de notre programme.
Notre alternative à l’austérité capitaliste articule les revendications sociales à la nécessité d’un gouvernement des travailleurs/ses pour les imposer :
-
annulation de la dette publique
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nationalisation sous contrôle des travailleurs du secteur bancaire et constitution d’un monopole public bancaire
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nationalisation sous contrôle des travailleurs des grands groupes capitalistes
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rupture avec l’UE et avec l’euro : création d’une nouvelle monnaie inconvertible et monopole étatique du commerce extérieur. Comme l'indiquait Trotsky, « La révolution socialiste commence sur le terrain national, se développe sur l’arène internationale et s’achève sur l’arène mondiale » ; nous devons donc assumer la nécessité d'un « protectionnisme socialiste », condition indispensable au démarrage d’une rupture anticapitaliste à une échelle nationale, tout en poursuivant l’objectif stratégique d’une extension du processus révolutionnaire. Les rythmes et les formes de la rupture vont dépendre de la lutte de classes, de son extension. La lutte anticapitaliste est internationale et doit se développer et s'affirmer dans chaque pays.
Pour les élections du 20 septembre, nous apportons notre soutien politique aux anticapitalistes grecs (Antarsya et EEK) qui indiquent dans leur plateforme électorale : « Nous combattons pour une rupture et une sortie de la zone euro / UE qui a un contenu anticapitaliste, internationaliste, anti-impérialiste, basée sur la coopération des travailleurs et des masses populaires de l'Europe dans une direction socialiste et communiste modernes ». Il s'agit d'affirmer le programme anticapitaliste révolutionnaire et d’essayer de donner une continuité à la lutte du non dans le referendum, contre l’austérité, les mémorandums et la Troïka, en tirant toutes les leçons de l’échec du gouvernement Syriza-Anel. La campagne électorale d'Antarsya doit jouer un rôle dans l'impulsion des comités unitaires contre le nouveau gouvernement, des grèves contre l'austérité, d'une mobilisation populaire contre les privatisations.
Au moment même où le Secrétariat Unifié de la IVème Internationale préconisait (le 12 août) l'unité de Syriza en écrivant que « la plateforme de gauche de Syriza va se battre dans les prochaines semaines pour que la Troïka ne recueille pas une nouvelle victoire en réussissant à faire voler en éclat ce parti », la gauche de ce parti rompait et constituait « l’Unité populaire ». C'est un développement positif. Mais cela ne nous fait pas oublier que pendant 6 mois, les dirigeants de la Plateforme de gauche de Syriza ont refusé de s'opposer à la politique de Tsipras qui conduisait à la capitulation finale de l'été. Ils ont accepté l'accord cadre du 20 février qui actait le renoncement du gouvernement à mettre en œuvre son programme anti-austérité. Ils ont refusé d'appeler les travailleurs à se mobiliser.
Le programme d’Unité populaire assume aujourd’hui la nécessité de rompre avec la Troïka et avec l'euro. Il est aussi plus radical que le programme électoral de Syriza de 2015 (« programme de Thessalonique »), renouant avec le programme originel de Syriza : annulation de la « plus grande part » de la dette, nationalisation des banques, etc. Mais il en partage donc aussi les mêmes limites fondamentales, celui de l’antilibéralisme keynésien, prônant le développement d'une économie mixte capitaliste (avec un secteur public, un secteur privé, et un tiers secteur) qui repartirait grâce à la dévaluation de la monnaie et aux mesures de « relance ».
Nous sommes favorables à toute forme de coordination européenne de la lutte contre l’austérité à condition qu'elle ait comme objectif d'impulser une lutte réelle. Nous ne pensons pas qu'une conférence européenne d'appui à un soi-disant « plan B » soit un pas en avant. La coordination doit avoir comme objectif la lutte contre l'UE et sa politique avec des échéances concrètes de mobilisation et de lutte. Dans ce cadre, et sans en faire un préalable à une action commune, nous défendrons notre programme anticapitaliste révolutionnaire, tout en expliquant que les « plans B » des antilibéraux sont une impasse.