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    Le répugnant Badinter propose de liquider notre code du travail

    Lien publiée le 16 juin 2015

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    Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

    (Le Monde)

    L’ancien garde des sceaux Robert Badinter et le professeur de droit du travail Antoine Lyon-Caen déplorent la complexité croissante de la législation du travail. Dans « Le Travail et la loi », à paraître le 17 juin chez Fayard, ils proposent d’en refonder les principes afin de rétablir la confiance des acteurs sociaux pour mieux lutter contre le chômage.

    Par Robert Badinter et Antoine Lyon-Caen

    Le texte que nous présentons dans Le Monde procède d’un constat. Le chômage n’a cessé de croître en France depuis quatre décennies. Un million de chômeurs de plus pendant le précédent quinquennat, un demi-million depuis le début de l’actuel quinquennat. Le chômage en France frappe 3,53 millions de personnes, auxquelles s’ajoutent 1 800 000 personnes en activité réduite. Chiffres terribles quand on les compare à la population active en France, soit 29 millions de personnes. Et si l’on considère qu’au-delà de ceux qui sont personnellement atteints, l’angoisse de perdre son emploi pour les aînés et de n’en pas trouver pour les jeunes est présente chez beaucoup de Français, le chômage apparaît tel qu’il est : un cancer de la société française.

    On ne peut reprocher aux gouvernements successifs d’être restés inertes face au mal. On ne compte plus les modifications du droit du travail ni les formes multiples d’aides accordées aux entreprises pour qu’elles conservent ou recrutent des salariés. En vain, à ce jour.

    Parmi les éléments négatifs qui contribuent à cet échec collectif, il en est un fréquemment dénoncé : la complexité croissante du droit du travail. Il est vrai que le code du travail paraît aujourd’hui atteint d’obésité. A l’aube de la crise qui a frappé l’Occident en 1974, il comportait 600 articles. Quarante ans plus tard, le code du travail en compte plus de 8 000. Certains esprits en déduisent que, loin de réduire le chômage, cette inflation législative y contribue. La conclusion paraît hâtive car nombre de dispositions du code du travail sont utiles. L’avalanche législative dans ce domaine fait naître l’inquiétude chez les employeurs, surtout dans les petites entreprises qui ne bénéficient pas des conseils de juristes spécialisés. Quant aux salariés, ils se sentent perdus face à cette forêt de textes. Le code du travail se veut protecteur et rassurant. Il est devenu au fil des ans obscur et inquiétant. Cette inquiétude collective entrave.

    image:

    "Le Travail et la loi", de Robert Badinter et Antoine Lyon-Caen (Fayard).

    Quel est le remède ? Une bonne législation est celle qui s’appuie sur des principes fondamentaux clairement énoncés et reconnus par la société comme exprimant les valeurs sur lesquelles elle repose. Une législation pour être efficace doit répondre à une double fonction : expressive et normative. Expressive parce qu’elle traduit les valeurs d’une société. Normative parce qu’elle ordonne les relations entre ses membres. Or, s’agissant du contrat de travail, les principes existent mais ils ont disparu sous la masse des textes trop souvent dictés par une finalité immédiate, dans l’espérance toujours déçue qu’une modalité nouvelle suscitera des milliers d’emplois. Et le sentiment d’échec des gouvernements ainsi que l’anxiété vont croissant dans le corps social.

    On ne rendra au droit du travail la lisibilité et l’efficacité nécessaires qu’à la condition que soient remis en lumière, au-delà de l’accumulation des textes, les principes qui en constituent les fondements.

    C’est à cette tâche que nous nous sommes employés. Notre travail n’est point le fruit d’une commande gouvernementale ou syndicale. Il est seulement l’expression d’une conviction : il faut rendre aux acteurs sociaux confiance dans le droit qui régit leurs rapports et cette confiance ne renaîtra que si ce droit, libéré de ses branches mortes et de ses rameaux inutiles, repose sur des principes clairs, conformes aux valeurs de la démocratie française au XXIe siècle.

    Si, comme nous l’espérons, un consensus se fait sur l’essentiel de ces principes, il appartiendra alors aux pouvoirs publics et aux partenaires sociaux de les inscrire dans la législation du travail. Car plus les principes sont clairs et reconnus, plus leur déclinaison sera aisée. Enfin, des modèles informatisés de contrats de travail pourront être mis à la disposition des employeurs et des salariés par les pouvoirs publics et les organisations syndicales et professionnelles. Ainsi pourra être dissipé le brouillard juridique où employeurs et salariés redoutent de s’engager. Et la clarté retrouvée favoriser l’embauche.

    Robert Badinter et Antoine Lyon-Caen

    • I. DROITS FONDAMENTAUX

    Article 1 : Les droits fondamentaux de la personne sont garantis dans l’entreprise

    Article 2 : Le respect de la dignité des personnes est assuré dans l’entreprise.

    Article 3 : L’employeur veille dans l’entreprise au respect des dispositions légales interdisant les discriminations, notamment à raison de l’origine, des opinions, de la religion, de l’âge, du sexe, de l’orientation sexuelle, de l’état de santé ou du handicap physique.

    Article 4 : Toute mesure qui porte atteinte dans l’entreprise à l’égalité entre les femmes et les hommes est nulle.

    Article 5 : Les différences de traitement entre salariés dans l’entreprise ne sont admissibles qu’à condition de répondre à un but légitime.

    Article 6 : Il est interdit d’employer un mineur de moins de 16 ans, sauf si le travail prend place dans une formation professionnelle ou alterne avec elle.

    Article 7 : Le harcèlement moral ou sexuel est interdit et sa victime protégée.

    Article 8 : L’employeur a le pouvoir d’organiser le travail dans l’entreprise. Il prend les mesures nécessaires pour garantir la sécurité, protéger la santé physique et mentale des salariés et assurer l’adaptation du travail à la personne du salarié.

    • II. FORMATION ET EXÉCUTION

    Article 9 : Le contrat à durée indéterminée est la forme normale de la relation de travail. Le contrat à durée déterminée permet de répondre aux besoins temporaires de l’entreprise.

    Article 10 : Il est interdit de mettre un salarié à la disposition d’une autre entreprise, dans un but lucratif, sauf dispositions législatives expresses.

    Article 11 : Les procédures de recrutement respectent la dignité et la vie privée du candidat.

    Article 12 : Le salarié a droit, lors de son embauche, à une information complète et écrite sur les éléments essentiels de la relation de travail.

    Article 13 : Toute embauche d’un salarié donne lieu à déclaration aux organismes de sécurité sociale.

    Article 14 : Tout contrat à durée indéterminée peut comporter une période d’essai raisonnable.

    Article 15 : Le contrat de travail se forme et s’exécute de bonne foi.

    Article 16 : L’employeur assure au salarié les moyens d’effectuer son travail. Le salarié exécute avec diligence la prestation convenue.

    Article 17 : L’employeur assure l’adaptation des salariés à l’évolution de leur emploi. Il veille, notamment par une formation continue, au maintien de leur capacité à occuper un emploi.

    Article 18 : Toute évaluation professionnelle est respectueuse de la dignité et de la vie privée du salarié.

    Article 19 : Le transfert d’une entreprise emporte transfert du contrat de travail.

    Article 20 : La grossesse et la maternité ne peuvent justifier d’autres mesures que celles requises par l’état de santé de la femme. La grossesse ouvre droit à un congé qui se poursuit au-delà de l’accouchement.

    Article 21 : Le salarié bénéficie de congés qui lui permettent de concilier sa vie au travail avec sa vie personnelle, familiale et civique.

    Article 22 : L’incapacité au travail médicalement constatée justifie des arrêts de travail. Elle ouvre la voie à un licenciement en cas d’impossibilité de retour à l’emploi.

    Article 23 : La maladie grave du salarié justifie ses absences pour traitement médical.

    Article 24 : Le salarié victime d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle bénéficie de garanties spécifiques.

    • III. RUPTURES

    Article 25 : Tout licenciement requiert de l’employeur qu’il informe le salarié de son projet, recueille ses observations et dispose d’un motif réel et sérieux pour y procéder.

    Article 26 : Le licenciement requiert un préavis et ouvre droit au versement d’une indemnité, sauf faute grave du salarié.

    Article 27 : Le salarié peut, sous réserve de l’abus, librement mettre fin au contrat à durée indéterminée.

    Article 28 : Nul ne peut être écarté de son emploi en raison de son âge ou de sa vocation à percevoir une pension de retraite sauf dispositions législatives expresses.

    Article 29 : L’employeur et le salarié peuvent mettre fin, d’un commun accord, au contrat de travail en concluant une convention homologuée par l’autorité administrative.

    Article 30 : Toute rupture s’accompagne de la délivrance par l’employeur de documents attestant des fonctions exercées par le salarié et des sommes réglées lors de son départ.

    • IV. DISCIPLINE

    Article 31 : L’employeur qui entend prononcer une sanction disciplinaire doit faire connaître au salarié les faits reprochés, susciter et recueillir ses observations et motiver sa décision.

    • V. DURÉE DU TRAVAIL

    Article 32 : Le temps de travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l’employeur et se conforme à ses directives. Le temps de repos est le temps libre de toute subordination.

    Article 33 : Afin de préserver la santé du salarié ainsi que sa vie privée et familiale, la durée quotidienne et la durée hebdomadaire de travail effectif ne peuvent dépasser les limites fixées par la loi. Ces limites sont susceptibles de dérogation par voie d’accord collectif et, à titre exceptionnel, par décision de l’administration, dans les conditions prévues par la loi.

    Article 34 : Tout salarié bénéficie d’un repos quotidien d’une durée minimale fixée par la loi. Celle-ci prévoit les conditions dans lesquelles cette durée peut être réduite à titre exceptionnel. Dès que le temps de travail quotidien atteint une durée déterminée par la loi, le salarié bénéficie d’un temps de pause raisonnable.

    Article 35 : Il est interdit de faire travailler un salarié plus de six jours par semaine. Le repos hebdomadaire est donné le dimanche sauf dérogation dans les conditions déterminées par la loi.

    Article 36 : Le travail de nuit n’est possible que s’il est nécessaire pour assurer la continuité d’une activité économique ou d’un service d’utilité sociale et si la protection de la santé et de la sécurité du salarié est prise en considération. Sa mise en place requiert une convention ou un accord collectif, ou, à titre exceptionnel, une autorisation administrative.

    Article 37 : Tout salarié a droit, chaque année, à un congé payé à la charge de l’employeur. La durée de ce congé et ses modalités sont fixées par la loi. La période de prise des congés payés est fixée par les conventions et accords collectifs, et, à défaut, par l’employeur dans le respect des usages.

    Article 38 : La durée normale du travail effectif est établie par les conventions et accords collectifs et, à défaut, par la loi. Les heures de travail accomplies au-delà de la durée normale ne peuvent dépasser une limite fixée par convention ou accord collectif, ou à défaut, par décret. Elles donnent lieu à une rémunération majorée. Le calcul de la durée normale de travail s’effectue par périodes hebdomadaires, sauf si les conventions et accords collectifs en disposent autrement.

    Article 39 : Une durée du travail inférieure à la durée normale peut être établie d’un commun accord entre l’employeur et le salarié. L’accord détermine les horaires de travail et les conditions de leur éventuelle variation. Le salarié à temps partiel bénéficie de droits reconnus au salarié dont la durée de travail est normale. Il a droit à une rémunération déterminée proportionnellement à celle de ce salarié.

    Article 40 : L’employeur et le salarié disposant d’une liberté d’organisation de son travail peuvent convenir d’une rémunération mensuelle forfaitaire incluant le paiement d’un nombre déterminé d’heures supplémentaires. Ils peuvent aussi convenir d’une durée forfaitaire de travail dans l’année, à condition que la convention ou l’accord collectif applicable garantisse le respect du droit au repos et à la protection de la santé du salarié.

    • VI. RÉMUNÉRATION

    Article 41 : Tout salarié a droit à un salaire lui assurant une vie libre et digne. Le salaire est proportionné à l’ampleur et à la qualité du travail.

    Article 42 : La rémunération du salarié est mensuelle et indépendante, pour un horaire de travail effectif déterminé, du nombre de jours travaillés par mois.

    Article 43 : Les sommes dues à titre de rémunération sont saisissables ou cessibles dans les proportions et selon des seuils déterminés par décret.

    Article 44 : L’action en paiement du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où le salarié a connu les faits lui permettant de l’exercer.

    • VII. LITIGES DU TRAVAIL

    Article 45 : La juridiction du travail est compétente pour connaître tout différend né à l’occasion de la conclusion, de l’exécution ou de la rupture d’un contrat de travail.

    Article 46 : Toute mesure prise à l’égard d’un salarié pour avoir saisi la justice d’un différend est nulle.

    Article 47 : Toute mesure prise à l’égard d’un salarié pour avoir témoigné dans un litige du travail est nulle.

    Article 48 : L’action en justice relative à une discrimination obéit à des règles de preuve adaptées à la situation du salarié.

    • VIII. DÉFENSE DES INTÉRÊTS DU SALARIÉ

    Article 49 : Tout salarié a droit à voir ses intérêts défendus par un syndicat de son choix.

    Article 50 : Tout salarié a droit à participer à l’élection d’un représentant qui assure la défense de ses intérêts dans l’entreprise. Les modalités de l’élection du représentant et ses pouvoirs sont fixés par la loi.