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Le variant Omicron et la rupture des brevets
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Le variant Omicron et la rupture des brevets | LIT-QI (litci.org)
Depuis le début de la pandémie, nous dénonçons l’apartheid vaccinal créé par l’impérialisme. La « quatrième vague » qui ravage l’Europe et la nouvelle mutation du coronavirus, appelée Omicron, prouvent que nous avions raison de dire que les gouvernements nationaux, de tous les pays, et les grandes multinationales étaient, et sont toujours, plus intéressés par la garantie de leurs profits que par la vie de la classe ouvrière[1].
C’est pourquoi les pays du continent africain ont reçu une quantité de vaccins bien inférieure à leurs besoins, ce qui fait que les pourcentages de population vaccinée sont très faibles.
Par : Wilson Honório da Silva et Américo Gomes
La voie à suivre ne consiste pas à fermer les frontières.
En outre, ce qui nous indigne, c’est que, face à l’apparition du nouveau variant, la réaction des pays développés et sous-développés vassaux de l’impérialisme, comme le Brésil, au lieu de développer un mouvement de solidarité avec les pays d’Afrique australe, c’est-à-dire du sud du continent, ou une mobilisation pour les soutenir avec des vaccins et du personnel médical, a été de fermer les frontières de ces pays, en suspendant les vols et les liaisons aériennes.
La preuve que la mesure a beaucoup plus à voir avec la marginalisation et la discrimination historiques qui entourent le continent africain peut être illustrée par deux faits : d’une part, l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) déclare qu’il n’y a pas assez d’informations sur le nouveau variant pour justifier des mesures extrêmes ; d’autre part, de nombreux rapports indiquent que la 4e vague en Europe est très forte et, malgré cela, ces liaisons aériennes ont été maintenues.
Au Brésil, l’Agence nationale de surveillance sanitaire (Anvisa) a recommandé au gouvernement de suspendre immédiatement les vols en provenance de six pays : Afrique du Sud, Botswana, Eswatini (anciennement Swaziland), Lesotho, Namibie et Zimbabwe. Et même en sachant que le nouveau variant (détectée au Botswana et en Afrique du Sud) a également été détectée à Hong Kong, en Israël et en Belgique, le gouvernement Bolsonaro veut maintenant interdire les voyageurs de quatre autres pays africains : l’Angola, le Malawi, le Mozambique et la Zambie.
La proposition impérialiste et le génocide des plus pauvres
Ce variant potentiellement plus contagieux a été identifiée par des scientifiques sud-africains, qui ont rapidement partagé ces connaissances avec le monde entier et sont aujourd’hui sanctionnés. Maintenant, la bourgeoisie se dit surprise et les marchés boursiers se sont effondrés dans le monde entier. Mais le fait est que cette situation a été développée par les grandes multinationales.
En novembre 2020, l’OMS a affirmé qu’elle procéderait à une distribution équitable des vaccins dans le monde, lorsque le Royaume-Uni et l’UE ont bloqué les demandes d’un groupe de pays dirigés par l’Afrique du Sud et l’Inde pour que les brevets soient libérés afin qu’ils puissent augmenter leur production et accroître la disponibilité des vaccins pour les pays pauvres. Mais c’était un autre mensonge.
Environ 60 % des vaccins produits en 2021 sont monopolisés par des États représentant 16 % de la population mondiale. En outre, 76 % des doses appliquées étaient concentrées dans les dix pays les plus riches du monde. En chiffres concrets, sur les 6,4 milliards de doses de vaccins administrées dans le monde, seuls 2,5% l’ont été en Afrique, alors que le continent représente un peu plus de 17% de la population mondiale.
La solution à la pénurie de vaccins proposée par l’impérialisme était l’initiative Covax, un programme créé en 2020 par l’OMS pour la distribution de vaccins par des entités philanthropiques, auquel 72 pays ont adhéré. Mais son objectif maximal, en 2021, était de vacciner 20% de la population mondiale, un taux manifestement insuffisant. Pour les pays dont la situation financière est la plus mauvaise, elle s’est limitée à la redistribution de l’excédent. C’est-à-dire uniquement les restes des pays riches. De plus, le budget du programme pour l’achat de vaccins est de 2 milliards de dollars, alors que 5 milliards auraient été nécessaires.
Même le minuscule objectif de l’OMS (selon lequel tous les pays devraient vacciner au moins 10 % de leur population) n’a pas été atteint. Dans la pratique, plus de 50 pays n’ont pas atteint cet objectif, la plupart d’entre eux en Afrique, où seuls environ 7 % des habitants du continent sont entièrement vaccinés, contre 42 % de la population mondiale[2]. Et il convient de rappeler que l’objectif initial, qui était de fournir 620 millions de doses à l’Afrique, a été ramené à 470 millions, ce qui ne concerne que 17 % de la population africaine.
Comme nous l’avons déjà annoncé : « Cette inégalité, en plus d’être obscène, est inutile pour vaincre la pandémie. Il est inutile pour certains pays de vacciner 70% de leur population si le covid-19 continue à circuler dans d’autres parties du monde. S’il n’est pas éradiqué, le virus continuera à se transmettre et à muter, créant de nouveaux variants qui invalideront l’efficacité des vaccins actuels. C’est ce qui se passe actuellement. »[3]
Inégalité obscène et dangereuse
En Afrique du Sud, le pays ayant le taux de vaccination le plus élevé du continent, où plus de 90 000 personnes ont officiellement perdu la vie, seuls 24% environ ont reçu les deux doses[4]. Dans d’autres pays, la situation est pire : 18% au Zimbabwe, 11% au Mozambique et en Namibie, et seulement 3% au Malawi. La moitié des 54 pays ont vacciné moins de 2 % de leur population. Deux pays – le Burundi et l’Érythrée – n’ont même pas commencé à mettre en œuvre leur programme de vaccination.
Comme les brevets des grandes multinationales n’ont pas été brisés, les pays les plus en difficulté économique sont à la traîne en matière de vaccination, comme c’est le cas sur tout le continent africain, tandis que la grande industrie pharmaceutique continue à gagner beaucoup d’argent et à faire beaucoup de bénéfices, mettant en danger l’humanité entière.
La pauvreté et la faim augmentent en Afrique
La pandémie a accru la souffrance, le chômage et la faim des populations du continent africain. Ce virus, qui trouve son origine dans le profit capitaliste et la relation que les grandes multinationales entretiennent avec la nature, a eu des effets dévastateurs sur la planète.
En Afrique, comme nous l’avons déjà écrit, l’évolution de la pandémie a progressivement détruit les systèmes de santé fragiles de ces pays[5]. Même en tenant compte de la sous-déclaration, l’Afrique a connu une augmentation de 30 % des infections et a mis en œuvre moins de mesures de santé publique que tout autre continent.
La fermeture des frontières, comme c’est à nouveau le cas, a été préjudiciable non seulement au tourisme mais aussi au secteur informel en Afrique. Selon un rapport d’Oxfam, l’impact économique de la pandémie pourrait retarder de 30 ans le développement de certaines régions du continent.
Actuellement, la baisse du revenu des ménages en Afrique est de 20% supérieure à celle observée dans le reste du monde. Ce qui jette plus de gens sous le seuil de pauvreté. En 2019, à travers le continent, 135 millions vivaient dans de telles conditions. À la fin de 2020, ce nombre aura doublé.
Dans l’ensemble de l’Afrique, 19 % de la population est sous-alimentée (plus de 250 millions de personnes). Les femmes et les filles représentent plus de 70% des personnes souffrant de la faim chronique. La pandémie affecte leurs conditions alimentaires, familiales et culturelles, et entraîne notamment une augmentation du nombre de victimes d’agressions sexuelles.
Même les maigres programmes de relance sociale créés par certains gouvernements impérialistes n’existent pas dans les pays africains. En outre, dans la plupart des pays africains, l’apprentissage virtuel n’existe tout simplement pas et des centaines de millions de personnes vivent dans des économies informelles.
Même ceux qui sont en première ligne pour combattre la pandémie n’ont pas de vaccin.
Cette situation tend évidemment à s’aggraver avec l’émergence du variant Omicron, dont l’existence elle même présage davantage de souffrances et de morts. Rappelons que, selon des données de l’université John Hopkins, publiées par l’agence BBC News, en juillet dernier, lorsque le variant Delta a commencé à frapper le continent avec plus de force, on a constaté une augmentation de 40 % du taux de mortalité.
Selon les études publiées jusqu’à présent, Omicron pourrait être une mutation plus infectieuse, plus agressive et plus mortelle que les précédentes, ce qui, malheureusement, pourrait s’avérer vrai. En Afrique du Sud, le 16 novembre, les rapports officiels ont enregistré 273 cas. Une semaine plus tard, le nombre de personnes infectées est passé à 1 275. Et le jour suivant, il a doublé : 2 465.
Ceci dans un contexte où même parmi les travailleurs de la santé, les taux de vaccination sont effroyablement bas. Seuls 27 % des agents de santé en Afrique étaient entièrement vaccinés, ce qui contraste avec les plus de 80 % d’agents de santé vaccinés dans les pays à revenu élevé[6]. Seuls six pays africains ont atteint une couverture vaccinale de 90 % parmi les agents de santé et neuf autres ont vacciné entièrement moins de 40 % des agents cliniques et des agents de santé de première ligne.
Briser les brevets pour étendre la vaccination
Une tâche de premier ordre et urgente consiste à organiser la lutte pour briser les droits de propriété intellectuelle, non seulement sur les vaccins, mais sur tous les médicaments et toute technologie médicale nécessaires pour contenir le Covid-19.
Les brevets permettent aux entreprises pharmaceutiques et autres d’exploiter une invention, en l’occurrence les vaccins, pendant 20 ans à compter de sa divulgation. En d’autres termes, il s’agit d’un instrument juridique permettant aux grandes entreprises de s’assurer un monopole sur les produits scientifiques et les nouvelles technologies.
Ce sont ces règles de « protection intellectuelle » qui font obstacle à la production de vaccins dans les pays qui ne détiennent pas ces brevets, mais qui disposent d’une capacité industrielle suffisante pour le faire, y compris à l’heure actuelle, comme le Canada, le Brésil, le Mexique, l’Argentine, l’Inde, l’Égypte et la Corée du Sud. Seul le Serum Institute, en Inde, est capable de produire 1,5 milliard de doses par an.
Preuve que sans cet obstacle, la production et l’approvisionnement de masse du vaccin seraient possibles, ce qui accélérerait son application dans tous les pays.
Une politique de classe et anti-impérialiste
Nous avons besoin que la classe ouvrière et ses secteurs les plus exploités et opprimés (par le racisme, le machisme, la LGBTIphobie, la xénophobie, etc.) se mettent à la tête de cette lutte. Les processus de mobilisation indiqués dans les soulèvements qui ont lieu au Sénégal, en Angola, en Algérie, au Soudan et dans d’autres pays du continent montrent qu’il existe un potentiel révolutionnaire.
Mais pour cela, il est nécessaire de construire des organisations internationales de la classe ouvrière qui, par la démocratie interne, peuvent centraliser et diriger la lutte de classe, qui peuvent être l’expression consciente de ce processus et des luttes en cours, y compris pour la défense de la vie face à la pandémie.
Pour cela, il est fondamental que les travailleurs du continent africain, qui sont à la pointe de ces luttes, construisent des organisations révolutionnaires dans leurs pays. Il n’y a pas d’autre issue. Sinon, nos frères et sœurs de ce vaste et riche continent continueront à vivre ce massacre et ce génocide.
Traduction Silas Teixeira
[1] Lire l’article « L’impérialisme impose un apartheid vaccinal » ( publié en avril 2021.
[2] Portail « Our World Data » (Université d’Oxford) : .
[3]L’impérialisme impose l’apartheid vaccinal,
[4] Portail « Our World Data » (Université d’Oxford)
[5]Lire l’article « Pandémie et famine en Afrique » (03/05/2021) : .
[6] Organisation mondiale de la santé (OMS)