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Les communistes et le Donbass

Ukraine

Lien publiée le 2 avril 2022

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Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

Les communistes et le Donbass – ACTA

Non, la guerre en Ukraine n’a pas commencé le 25 février dernier. Elle dure en réalité depuis huit ans et a fait plus de 13 000 morts (civils et militaires) dans les régions orientales du pays à majorité russophone. Au sein du camp, tout sauf homogène, de ceux que nos médias nomment les « séparatistes pro-russes », les communistes – d’Ukraine, de Russie et d’ailleurs – ont joué un rôle important. Ils ont également subi la répression et les manœuvres du Kremlin. L’article qui suit tente de retracer une histoire encore largement méconnue.

Les communistes et le Donbass

L’insurrection du Donbass : de la révolte populaire à la résistance armée

Comme nous le rappelions dans notre précédent article, l’étincelle qui a exacerbé la révolte dans les régions orientales du pays a été la suppression le 23 février 2014, au lendemain de la destitution de l’ancien président Viktor Ianoukovitch, du statut officiel de la langue russe par les nouveaux dirigeants ukrainiens. Manifestations populaires défiant l’autorité du pouvoir central, affrontements de rue entre pro et anti-Maïdan, créations de brigades d’auto-défense en Crimée1, bâtiments administratifs pris d’assaut à Donetsk et Lougansk : la situation prend rapidement un tour insurrectionnel.

Si l’on en croit Alexandre Tcherepanov, secrétaire du Comité Central du Parti Communiste Ouvrier de Russie (PCOR-PCUS), la composition sociale du soulèvement dans le Donbass était largement prolétarienne :

La résistance populaire dans le Donbass a eu dès le début un caractère antinazi et a rassemblé les personnes et les tendances idéologiques les plus diverses (communistes, patriotes et monarchistes russes, Cosaques, défenseurs de l’Église orthodoxe, volontaires internationalistes, etc.) mais d’un point de vue de classe, la base du mouvement était avant tout composée de la classe ouvrière du Donbass.

En juin 2015, L’Humanité consacrait d’ailleurs un article à la mobilisation des mineurs dans les milices armées du Donbass, soulignant au passage leur attachement à l’antifascisme et aux symboles du passé soviétique, dont les statues de Lénine (massivement saccagées par les nationalistes ukrainiens à travers le pays).

Selon Victor Shapinov, militant communiste ukrainien, la russophobie des nationalistes et autres néo-bandéristes qui étaient à l’avant-garde du coup d’État se conjuguait, au sein de l’Euromaïdan, avec un mépris de classe agressif envers la population du Donbass :

Les habitants du Donbass sont pauvres, la plupart sont des mineurs et des ouvriers, et cela fait d’eux les ennemis de la « jeunesse dorée ». Ils [les pro-Maïdan issus de la bourgeoisie et de la classe moyenne] disent que les gens de la classe ouvrière sont des citoyens de seconde zone qui ne devraient pas voter ou avoir d’influence politique. Ce n’était donc pas seulement une question nationale ou linguistique, mais aussi une question sociale et de classe. Ils avaient non seulement des idées russophobes, mais aussi une sorte de racisme de classe contre le « bétail » du Donbass.

Pour beaucoup au sein de la population russophone, le massacre de la Maison des Syndicats à Odessa perpétré en mai 2014 par des fascistes ukrainiens – une quarantaine de morts dont de nombreux syndicalistes et militants de gauche – a un effet catalyseur2 :

Après la tragédie d’Odessa, la pente menant à la guerre civile devenait irréversible. Pour les habitants de Donetsk et de Lougansk, il était évident que si les républiques ne se maintenaient pas, ils connaîtraient le même sort que les manifestants anti-Maïdan d’Odessa.

Notons d’ailleurs que si le passage des manifestations populaires à l’insurrection armée se déploie principalement à Donetsk et dans les provinces de Lougansk, la résistance ne se limite pas aux seules régions du Donbass. À Odessa, Kharkiv; href="; le raconte Sergei Kirichuk</a> (Borotba) : <em>« À Kharkiv, le mouvement de contestation a commencé par une campagne visant à protéger le monument de Lénine. Des milliers de personnes, hommes et femmes, jeunes et vieux, travailleurs, chômeurs, étudiants et ingénieurs, se relayaient auprès du monument jour et nuit. Parfois, les fascistes les attaquaient avec des bâtons et des balles en caoutchouc. Pour Borotba, il était de notre devoir d&rsquo;être avec eux et parmi eux. La protection des monuments de Lénine a été un début important de la résistance. »</em>" title="" aria-describedby="qtip-2" style="box-sizing: border-box; background-color: transparent; color: rgb(255, 60, 54) !important; text-decoration: none; padding-top: 50px;" target="_blank">3 et dans d’autres villes d’Ukraine, des mobilisations antifascistes s’organisent, notamment sous l’impulsion du groupe marxiste Borotba (fondé par d’anciens membres du PC ukrainien). Caractérisant le nouveau pouvoir issu de Maïdan comme « le résultat de l’alliance tactique de la droite néo-libérale avec des groupes paramilitaires d’extrême droite », les militants de Borotba impriment aux rassemblements une coloration nettement anti-oligarchique. Le gouvernement de Kiev répond par la répression, en saccageant les locaux de l’organisation et en menant des vagues d’arrestation contre ses cadres. En juillet, le Parti Communiste d’Ukraine est banni, alors même que ses dirigeants avaient limité leur activité au seul cadre parlementaire. 

Revendications anti-oligarchiques et structuration du camp communiste

Tout au long des huit dernières années, les médias occidentaux n’ont cessé de présenter les combattants du Donbass comme des « séparatistes pro-russes » entièrement manipulés par le Kremlin. Or si Moscou a en effet cherché, et finalement réussi, à imposer son contrôle sur les structures dirigeants des républiques populaires, cela s’est fait au prix de violentes luttes d’influence, reflétant l’extrême diversité politico-idéologique du camp « séparatiste ».

Dans le rapport de Moscou aux rebelles du Donbass, un homme a joué un rôle décisif au cours de la première phase du conflit : il s’agit de l’oligarque ukrainien d’origine tatare Rinat Akhmetov. Natif de Donetsk, milliardaire (considéré comme l’homme le plus riche d’Ukraine), il est entre autres le propriétaire du Chakhtar Donetsk et domine l’industrie du charbon et de la métallurgie dans les régions orientales de l’Ukraine. Après avoir financé le Parti des régions de l’ancien président Viktor Ianoukovitch, il tente cette fois d’influencer simultanément les deux camps en conflit.

Les hommes d’Akhmetov tenaient des positions importantes dans l’administration ukrainienne mais aussi dans les structures de la république populaire de Donetsk, où ils firent obstruction aux demandes de nationalisation et autres revendications radicales des insurgés.

Sur le front militaire, alors que le soutien russe se limite à « l’envoi de matériel obsolète pris sur des stocks datant de l’armée soviétique », il devient clair que les jeunes républiques auto-proclamées ne sont absolument pas préparées à un conflit armé avec les forces loyalistes : « C’est seulement la monstrueuse incompétence de l’armée ukrainienne ainsi que la réticence non dissimulée des troupes ukrainiennes de base à effectuer des opérations punitives sanglantes qui a permis aux unités rebelles formées à la hâte de survivre lors des deux premiers mois. »

Au début de l’été 2014, Slaviansk est le centre d’une résistance menée par le volontaire russe Igor Girkin, dit « Strelkov ». Alors qu’une offensive ukrainienne est lancée le 1er juillet, Slaviansk se trouve encerclée – encerclement que Strelkov parvient à percer afin de marcher jusqu’à Donetsk, « juste à temps pour empêcher les hommes du Kremlin de livrer la ville au gouvernement de Kiev ».

Une purge d’ampleur s’ensuit, lors de laquelle les proches d’Akhmetov et autres tenants d’une ligne liquidatrice sont temporairement écartés des postes décisionnels.

Dans le même temps, l’aile gauche de la résistance se structure lors d’un meeting à Yalta le 7 juillet qui rassemble organisations communistes, du Donbass et de Russie, et militants anti-guerre occidentaux. La « déclaration de Yalta », qui conclut le meeting, affiche clairement ses objectifs : renverser l’oligarchie capitaliste, établir une économie mixte avec un secteur public développé et créer une « république sociale » en Ukraine.

En août d’ailleurs, une lettre publiée par des miliciens de base de Donetsk demande la nationalisation des propriétés détenues par les oligarques. Boris Litvinov, cadre du Parti Communiste d’Ukraine (et ancien membre du PCUS) ayant rompu avec le leadership officiel de son parti, prend la tête du Soviet suprême tandis qu’une loi est adoptée annulant la commercialisation des soins de santé adoptée précédemment. On assiste aussi à quelques tentatives, timides bien que récurrentes, de nationalisation.

À Lougansk s’opère une convergence des groupes de gauche autour d’Aleksey Mozgovoy, commandant de la fameuse Brigade Prizrak (« brigade fantôme »). Leur influence au sein du mouvement est entre autres perceptible au fait que la RPL décide d’inclure les symboles soviétiques dans ses armoiries officielles. Les troupes des républiques populaires sont également renforcées par des volontaires antifascistes (venus notamment d’Europe du sud) – renfort auquel le groupe de punk italien Banda Bassotti, avec ses « caravanes antifascistes », confère une certaine résonance médiatique.

Ajoutons, parmi les indices de l’importance du pôle communiste dans la phase initiale de l’insurrection, qu’un référendum organisé le 11 mai 2014 affirme explicitement qu’il faut considérer la République populaire de Donetsk comme le successeur légal de la république de Donetsk-Krivoï Rog, fondée en 1918 par les bolchéviques et les sociaux-révolutionnaires de gauche, puis écrasée par les armées allemandes.

Moscou et la ligne du compromis stratégique

Mais Moscou, qui depuis le début apporte le minimum d’appui nécessaire à la survie des républiques populaires tout en tâchant d’y étouffer les velléités révolutionnaires, regarde avec inquiétude l’essor de la gauche dans le Donbass :

Les groupes liés à Moscou et à l’oligarchie locale tentaient de marginaliser les éléments radicaux et de créer les conditions d’un compromis avec Kiev. Moscou usait aussi de son influence pour créer les conditions de sa propre réconciliation avec l’Occident.

Après l’échec d’une nouvelle offensive ukrainienne en août, les républiques du Donbass sont confrontées à une importante crise politique et administrative. C’est à ce moment-là que Strelkov, en particulier, est écarté, dans ce qui apparaît comme une vengeance des éléments pro-Kremlin qui avaient été évincés en juillet.

Car « en dépit de ses sympathies monarchistes et de sa nostalgie de l’empire russe, Strelkov poussait véritablement à la radicalisation au sein des républiques ». Il ne cessait en particulier de répéter qu’il ne laisserait pas la Novorossiya se transformer en une sorte de répétition de l’Ukraine pré-Maïdan. Ses plans, de toute évidence, ne coïncidaient pas avec ceux du Kremlin.

Strelkov écarté, les proches de l’oligarchie pouvaient reprendre possession des postes clés. C’est d’ailleurs à ce moment qu’Oleg Tsarev, politicien ukrainien anciennement élu du Parti des régions, conçoit un « nouveau drapeau » pour les républiques du Donbass, sorte de version inversée du vieux drapeau impérial, dans l’optique manifeste de contrebalancer le drapeau rouge à la croix de Saint André qui était celui des miliciens sur le terrain.

La presse russe se fait alors l’écho d’un pacte entre le gouvernement russe et Akhmetov, le Kremlin lui « livrant » les territoires libérés en échange des services de l’oligarque en tant que médiateur avec Kiev et les Occidentaux.

Mais « les militants et combattants qui construisaient le nouvel État sur le terrain n’étaient plus disposés à être les agents dociles de décideurs extérieurs » : de plus en plus, on constate « une accumulation de haine pour les bureaucrates du Kremlin, leurs sabotages et leurs trahisons ».

Après l’offensive ukrainienne du mois d’août (à laquelle survivent les républiques populaires), Moscou place Alexandre Zakharchenko à la tête de la RPD. Celui-ci devient négociateur en chef du protocole de Minsk qui aboutit à un cessez-le-feu le 4 septembre, alors même que les miliciens du Donbass s’approchaient de Marioupol, bloquant de facto la libération de ce port stratégique.

En effet, à ce moment-là, Poutine et son conseiller Vladislav Surkov en charge de la politique ukrainienne ont pour objectif principal d’éviter une confrontation directe avec l’Occident, et les États-Unis en particulier. On pourrait résumer ainsi leur ligne dans le conflit ukrainien : « dénier aux deux camps la possibilité d’une victoire décisive »

Comme le montrent les accords de Minsk, le gouvernement russe est prêt à accepter une réintégration des républiques populaires dans le giron ukrainien comme prix d’un compromis diplomatique avec Kiev et Washington.

Avec les accords de paix et la fin de la phase active du conflit militaire, Moscou réussit à imposer son contrôle sur les républiques rebelles, usant en particulier de l’aide humanitaire comme d’un puissant levier d’influence. Le scrutin du 2 novembre 2014 confirme cette tendance, avec l’élection, aussi bien à Donetsk qu’à Lougansk (avec l’accession au pouvoir d’Igor Plotnitski), de personnalités totalement fidèles au Kremlin.

Répression et assassinats en série

Les accords de Minsk-II, début 2015, s’accompagnent d’un processus de répression et de marginalisation de la gauche au sein des républiques populaires. À Donetsk, le parti communiste de Litvinov n’est pas autorisé à participer aux élections. À Lougansk les choses prennent une tournure nettement plus dramatique avec le meurtre de certains des commandants de milice les plus populaires.

En janvier 2015 Aleksandr Bednov, le « Batman de Lougansk » est tué par une unité spéciale de la police. Aleksey Mozgovoy, dont la Brigade Fantôme a attiré un certain nombre de volontaires internationalistes, est tué en mai par un groupe armé non identifié (ses camarades ont mis en cause les officiels locaux). D’autres leaders rebelles critiques des accords de Minsk et des politiques pro-oligarchiques de la nouvelle administration inféodée au Kremlin sont aussi assassinés, dont Pavel Dremov – chef charismatique d’une unité cosaque forte de plusieurs centaines de combattants, qui avait notamment accusé Plotnitski de voler l’aide humanitaire russe et de vendre à l’Ukraine du charbon produit sur les territoires séparatistes. 

Mais « si ces éliminations physiques ont cassé toute résistance au contrôle du Kremlin sur les républiques populaires, elles n’ont pas résolu le problème majeur : que faire avec ces territoires et comment obtenir une réconciliation avec l’Occident sans affaiblir Poutine et son entourage ».

En effet, il est clair que la ligne de réconciliation et de compromis adoptée par Moscou lors de la phase initiale du conflit s’est transformée en impasse stratégique devant le refus manifeste de Kiev de mettre en œuvre les accords de paix (sous les pressions croisées du camp nationaliste en Ukraine et de ses parrains occidentaux).

Les communistes russes face à la guerre

Tout au long de ces huit dernières années, quelle a été la position des communistes russes vis-à-vis des républiques populaires d’une part, et vis-à-vis de la politique du Kremlin à leur encontre d’autre part ?

Il apparaît que les communistes russes ont très tôt mis en accusation le gouvernement de la Fédération de Russie pour son manque de soutien envers les combattants du Donbass. Tcherepanov, du PCOR-PCUS, que nous citions plus haut, raconte par exemple : 

En octobre 2014, après notre premier voyage au Donbass, le Comité central de notre parti a adopté une résolution sévère dans laquelle il accusait le président et le gouvernement de Russie d’avoir capitulé dans les Républiques populaires du Donbass, en refusant de fournir du matériel militaire, des munitions, de l’aide humanitaire.

Son organisation a ensuite activement milité pour que des passeports russes soient délivrés aux miliciens du Donbass qui le souhaitaient et aux membres de leurs familles.

Après nos appels répétés, nos rassemblements et nos piquets de grève dans les régions de Russie, la Douma a adopté, fin 2018, une loi visant à faciliter la délivrance de la citoyenneté russe aux résidents des deux Républiques populaires et, en avril 2019, le président de la Fédération de Russie a signé le décret présidentiel pour la délivrance de passeports russes aux citoyens de la RPL et de la RPD.

Quant à la reconnaissance officielle des républiques populaires, elle est portée depuis des années, y compris à la Douma, par le Parti Communiste de la Fédération de Russie (KPRF) – premier parti d’opposition. C’est d’ailleurs en réponse à l’appel parlementaire des députés communistes que Poutine a fini par reconnaître mi-février les républiques populaires, huit ans après leur proclamation.

De manière générale la plupart des formations communistes, qu’elles soient parlementaires ou extra-parlementaires, ont critiqué le caractère extrêmement tardif de la reconnaissance par Poutine des républiques du Donbass, tout en saluant sa décision. Pour le VKPB (Parti communiste pan-soviétique des bolchéviques, stalinien) : « la séparation des républiques populaires de Donetsk et Lougansk vis-à-vis de l’Ukraine, dominée par un régime néofasciste, est clairement un développement positif ». Le PCOR souligne que « l’impossibilité de parvenir à un accord avec les partenaires occidentaux et la multiplication des bombardements ukrainiens ont conduit les autorités bourgeoises de la Fédération de Russie à reconnaître la RPL et la RPD », rappelant néanmoins, comme nous l’expliquions plus haut, que « la plupart de ceux qui furent à la tête du soulèvement populaire de 2014 ont été écartés ou éliminés physiquement, remplacés par des marionnettes pro-bourgeoises ouvertement alignées sur le Kremlin ».

Au lendemain de l’invasion décidée par Poutine, le VKPB explique que « le régime russe tente de corriger ce que, logiquement, il aurait dû faire en 2014 (et n’a pas eu le courage de faire à l’époque), pour éviter le scénario du pire », en référence à la ligne du compromis portée par le Kremlin au début du conflit.

Quant au KPRF, si son chef Guennadi Ziouganov a soutenu et continue de soutenir l’intervention militaire en Ukraine (au nom de la lutte contre le gouvernement de Kiev, qualifié de « nazi-bandériste », et ses soutiens occidentaux), des dissensions commencent à se faire jour au sein du parti, plusieurs députés communistes appelant aujourd’hui ouvertement à participer aux manifestations contre la guerre, aux côtés d’autres personnalités de la gauche russe.

Le « Front de gauche » de Sergeï Oudaltsov (auquel Jean-Luc Mélenchon, par exemple, a souvent fait référence par le passé; href="; publié sur son blog</a> le 3 mars, Mélenchon annonce avoir rompu politiquement avec Oudaltsov, <em>« parce qu’il s’est prononcé pour la guerre »</em>. Il soutient désormais la minorité pacifiste ayant fait scission autour d&rsquo;Alexey Sakhnin, qui a rejoint la nouvelle plateforme anti-guerre évoquée plus haut." title="" aria-describedby="qtip-3" style="box-sizing: border-box; background-color: transparent; color: rgb(255, 60, 54) !important; text-decoration: none; padding-top: 50px;" target="_blank">4), qui avait accueilli avec enthousiasme le rattachement de la Crimée à la Russie en 2014, a rappelé dans un communiqué daté du 27 février son soutien à la reconnaissance des républiques populaires (ainsi qu’à l’appui de la Russie « pour libérer le Donbass des occupants nazis »), rendant hommage à l’héroïsme des combattants qui mènent depuis huit ans « une lutte de libération nationale courageuse ».

Mais si le Front de gauche estime justifié le concours militaire de la Russie à la libération du Donbass, il remet en cause l’invasion des autres régions d’Ukraine, exigeant une clarification quant aux objectifs stratégiques de l’opération en cours : « la défense du Donbass est une chose, la guerre de conquête en est une autre ».

Comme nous le voyons, les différents pôles de la gauche russe sont traversés par des contradictions nouvelles, à mesure que la guerre se prolonge, que les pertes humaines s’accumulent, à mesure aussi que des manifestations pacifistes se poursuivent, malgré la répression, dans plusieurs villes de Russie. Quoiqu’il en soit, il est clair que la capacité de mobilisation des forces progressistes aura un impact déterminant non seulement sur l’évolution de la guerre mais aussi et surtout sur l’étape d’après, qui risque fort d’être le théâtre d’une aggravation autoritaire du pouvoir poutinien, dont les signes avant-coureurs (menace de rétablissement de la peine de mort, censure de la presse, répression immédiate de tout rassemblement contestataire) sont déjà visibles.

Comme l’a résumé avec force le député communiste Mikhail Lobanov :

Après cette guerre déclenchée par le Kremlin, la Russie ne sera plus jamais la même. Mais les changements à venir dépendent de vous et de moi, de nos actions ou de notre inaction. Soit une multiplication de la répression et une gestion des problèmes économiques à nos dépens. Soit la démocratisation et un changement fondamental de cap dans l’intérêt de la majorité sous une forte pression de la base.

  1. Péninsule située au sud de l’Ukraine, abritant notamment une base navale stratégique. « Offerte » à l’Ukraine par Khrouchtchev en 1954, ses habitants votent massivement en faveur du rattachement à la Russie lors d’un référendum tenu le 16 mars 2014.
  2. Cette citation et les suivantes sont issues de Renfrey Clarke, « The Donbass in 2014: Ultra-Right Threats, Working-Class Revolt, and Russian Policy Responses », International Critical Thought, volume 6, issue 4 (December 2016), pp.534-555.
  3. Comme le raconte Sergei Kirichuk (Borotba) : « À Kharkiv, le mouvement de contestation a commencé par une campagne visant à protéger le monument de Lénine. Des milliers de personnes, hommes et femmes, jeunes et vieux, travailleurs, chômeurs, étudiants et ingénieurs, se relayaient auprès du monument jour et nuit. Parfois, les fascistes les attaquaient avec des bâtons et des balles en caoutchouc. Pour Borotba, il était de notre devoir d’être avec eux et parmi eux. La protection des monuments de Lénine a été un début important de la résistance. »
  4. Dans un texte publié sur son blog le 3 mars, Mélenchon annonce avoir rompu politiquement avec Oudaltsov, « parce qu’il s’est prononcé pour la guerre ». Il soutient désormais la minorité pacifiste ayant fait scission autour d’Alexey Sakhnin, qui a rejoint la nouvelle plateforme anti-guerre évoquée plus haut.