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Burkina, le nouveau Premier ministre parle d’armer le peuple face aux djihadistes!
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Burkina, le nouveau Premier ministre parle d'armer le peuple face aux djihadistes! - Mondafrique
Ibrahim Traoré, le chef de la junte burkinabé, qui vient de nommer son Premier ministre, agit dans l’urgence provoquée par la situation dramatique de son pays. Une mission quasi impossible, mais une junte militaire qui fait ses premiers pas avec un certain professionnalisme
Les assises tenues en un temps record, Ibrahim Traoré a nommé un Premier ministre, Apollinaire Kyelem de Tambela. La composition du gouvernement devrait être connue dans la semaine. Ce rythme soutenu pourrait être de bonne augure…
Un peu d’optimisme…
Outre le tempo que s’impose le capitaine Traoré, la nomination de l’avocat Tambela, pourrait être aussi une bonne nouvelle. L’homme est un sankariste historique, à la réputation d’être intègre, ce qui est loin d’être négligeable dans un moment où le pays traverse la pire crise de son histoire. Bardés de diplômes, le soixantenaire a aussi beaucoup écrit et beaucoup réfléchi sur les raisons des malheurs de son pays. En 2015, il recommandait la création ; style="box-sizing: border-box; background-color: transparent; color: rgb(77, 178, 236); text-decoration: none;" target="_blank">« d’un Etat fédéral en vue d’impliquer les populations au progrès économique et social ».
Apollinaire Kyelem de Tambela a aussi le sens des relations internationales, il s’est exprimé sur le dilemme qui agite l’Afrique aujourd’hui : qui choisir entre la France et la Russie ? Et il a adopté une attitude sage : « Il ne faut pas quitter quelqu’un pour aller vers un autre, mais voir ce que le Burkina Faso peut tirer de bon avec chaque partenaire. Il ne sera pas question de se laisser dominer, c’est la souveraineté du pays qui sera prise en compte en première ligne » a-t-il dit à l’antenne des médias burkinabè.
; style="box-sizing: border-box; background-color: transparent; color: rgb(77, 178, 236); text-decoration: none;" target="_blank">Dans une autre interview au quotidien Wakat Sera, l’avocat affirme la nécessité qu’il y aurait à s’interroge armer le peuple pour se défendre et sur le bien-fondé de la création des groupes d’autodéfense. Quoiqu’il en soit, Apollinaire Kyelem de Tambela, n’arrive pas les mains vides, il a eu le temps de développer une vision pour son pays.
Un océan de désespoir
Ce Premier ministre en association avec un président qui dit vouloir se préoccuper essentiellement de la situation sécuritaire et de celle des réfugiés semble être un duo cohérent, et c’est tant mieux car la tâche est immense. Le Burkina Faso est au bord de la rupture. Les djihadistes qui sont désormais une centaine de kilomètres de Ouagadougou, encerclent la ville de Ouahigouya.
Les groupes armés ont conquis les villes de Gourcy et Yako d’autant que l’armée est déstructurée et exsangue. Pire encore, récemment un chef de village a appelé ses administrés, en des termes très violents, à s’en prendre aux populations peules, ce n’est pas la première fois que de tels faits se produisent, mais ils sont de plus en plus fréquents. Des débuts de famine sont constatés dans le Nord, les déplacés internes sont de plus en plus nombreux, les réfugiés arrivent par milliers en Côte d’Ivoire. Comme partout ailleurs, l’inflation pèse sur les ménages, mais elle a encore plus de conséquences sur les plus fragiles d’entre-deux.
Le tandem Traoré/Tembela, ne peut compter sur un seul jour d’état de grâce.
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Le Premier ministre de la transition burkinabè Me Apollinaire Joachim Kyélem de Tambèla
Dans la foulée de son investiture par le Conseil constitutionnel comme président de la transition, chef de l’Etat et chef suprême des armées, le capitaine Ibrahim Traoré, a nommé Me Apollinaire Joachim Kyélem de Tambèla comme Premier ministre. Dans le choix de cet avocat, qui n’était point cité parmi les favoris et même les outsiders à ce poste, deux critères auraient été déterminants: intégrité et patriotisme. Bien connu des téléspectateurs, notamment ceux de la chaîne privée BF1, friands des débats sur la politique nationale et internationale, le désormais PM, a toujours été tranchant sur les sujets qu’il aborde. Cependant, malgré la rigueur et la précision qui sont siennes dans les interventions, il ne manque pas de sens de l’humour et sait taquiner certains de ses «co-débateurs» sur le plateau.
Par Wakat Séra
Voici un entretien que le nouveau chef de l’Exécutif a accordé, avant sa nomination, à nos confrères de L’Observateur Paalga», le doyen des quotidiens de la presse écrite burkinabè et qui révèle les qualités de l’avocat sans langue de bois dans ses propos.
Situation nationale: « Ceux qui parlent des Russes ne les connaissent pas vraiment »
(Me Apollinaire Kyélem de Tambèla)
Depuis le 2 octobre le capitaine Ibrahim Traoré conduit le bateau burkinabè en promettant de l’amener vers un doux rivage. Les observateurs rivalisent d’analyses sur la conduite de celui qu’il a déposé le lieutenant-colonel Paul- Henri Damiba ainsi que les nouvelles perspectives qui s’offrent à notre pays en tourments depuis 7 maudites années. Dans les lignes qui suivent Me Apollinaire Kyélem de Tambèla, avocat au Barreau du Burkina se prononce sur la Transition qui s’amorce. Pour le président du Mouvement fédéraliste africain l’histoire de la Haute-Volta au Burkina nous montre que les présidents sans Parlement ont été les meilleurs. Que le futur président gouverne par ordonnance car nous avons maintenant besoin d’un despote éclairé pour faire bouger les choses », a-t-il dit. Avant de dire aux sujets des Russes que certains appellent de tous leurs vœux pour remplacer la France, qu’ils ne connaissent pas vraiment le pays de Vladimir Poutine. Lisez plutôt.
Damiba a été victime d’une révolution de palais menée par le capitaine Ibrahim Traoré. En tant qu’analyste et sans jouer les prophètes après coup, est-ce que vous avez senti les choses venir?
L’entourage de Damiba m’assurait qu’il était bien assis. Sur cette base je dirai que je n’ai pas vu venir ce second coup d’Etat. Cependant d’autres personnes laissaient voir que les choses n’iraient pas jusqu’au bout vu qu’il y avait trop de contradictions. Je me suis dit alors qu’il y aurait un changement mais pas de sitôt. C’est pourquoi, j’ai été surpris par la rapidité et la tournure des évènements sinon le changement en tant que tel ne m’a pas vraiment étonné. Cela dit, je me pose aussi la question de savoir est-ce que le drame de Gaskindé intervenu le 26 septembre dernier contre un convoi de ravitaillement de la ville de Djibo n’a pas précipité les choses et donc galvanisé les contradictions contre le lieutenant-colonel Damiba?
Déviationnisme, tentative de restauration de l’ordre ancien, tels sont, entre autres, les griefs retenus contre le lieutenant-colonel Damiba. Les partagez-vous entièrement?
Je suis d’accord avec les griefs soulevés contre Damiba. Voyez-vous, il est un peu indécent pour un régime de prendre le pouvoir dans une situation de crise, avec comme objectif premier de régler le problème sécuritaire et commencer par améliorer le traitement de vie des membres de son gouvernement. Là, je fais allusion à l’augmentation de la rémunération des ministres et de la sienne alors que ce n’était pas le moment. Autrement dit, les gens s’attendaient à ce qu’on rabote ce traitement d’autant plus que la charte de la Transition a été rédigée gratuitement par des acteurs. Ce faisant, cela allait servait d’exemple. Il n’en sera pas le cas. Avec les évènements du 24 janvier 2022, je m’attendais à ce qu’on réduise le train de vie de l’Etat, à ce que le mandat des députés soit gratuit comme ce fut le cas sous la 2e République. Mais finalement c’est devenu plus budgétivore qu’avant son arrivée au pouvoir. L’autre problème c’est la réconciliation. On est tous pour la réconciliation mais surtout pour la vraie. Alors que ce qui se faisait par Damiba en l’occurrence la venue de Blaise Compaoré malgré qu’il soit condamné ne correspondait pas à l’image que le peuple a de la réconciliation nationale. Les nouveaux membres du MPSR ont évoqué cet aspect de façon suffisamment marquée. De plus, sur le terrain de lutte contre l’insécurité, il n’y avait pas beaucoup de progrès, les massacres de masse avaient repris. Et le dernier en date est celui de Gaskindé où le convoi de vivres en partance pour Djibo est tombé sous un traquenard inadmissible. En période de paix on l’aurait compris mais depuis 2016 on est en situation de guerre. Que des officiers au pouvoir qui connaissent le terrain n’ont pas pu prendre les mesures nécessaires de protection de ce convoi me laisse totalement sans voix. Ça montre qu’il y a des dysfonctionnements ou une absence de volonté pour régler ce problème.
Deux coups d’Etat en 8 mois. Etait-ce l’unique option pour rectifier le MPSR?
Le nouvel homme fort du pays, le capitaine Traoré a expliqué qu’il est resté pendant une semaine à Ouagadougou pour régler le problème avec Damiba mais sans succès. Il n’y avait pas de solution. L’alternative qui restait était que Damiba parte puisque qu’il est fatigué selon le capitaine Traoré. A mon avis, l’ancien président était arrivé au bout du rouleau, il n’en pouvait plus et donc pataugeait. La réalité est qu’il a refusé d’affronter les vrais problèmes en face. Les nouveaux dirigeants parlent de trahison de la part de Damiba car ce sont eux qui ont perpétré le coup d’Etat de fin janvier et l’ont placé à la tête du pays pour lui rendre hommage. Il faut relever que dans l’armée ce sont les capitaines et les commandants qui possèdent les troupes. Donc un colonel ou un général peut avoir de l’influence dans l’armée mais à travers les capitaines et les commandants. La preuve en est que lors du coup d’Etat de janvier, c’est un capitaine en la personne de Sidsoré Kader Ouédraogo qui a lu la déclaration. Ce fut aussi le cas sous la révolution et même avec le second coup. C’est eux qui avaient fait leur chose selon leur ligne. Et quand ils ont vu que Damiba n’allait pas dans leur sens, ils ont repris les rênes de l’Etat.
Est-ce que nous renouons avec les régimes militaires?
Non, il a bien dit que le pouvoir ne l’intéressait pas. Certes ! Beaucoup de gens l’ont dit pour revenir sur leur parole après mais tout dépendra de la vigilance populaire et du mouvement populaire. Même s’il veut conserver le pouvoir et que le mouvement populaire s’y oppose il ne pourra pas. Si vous remarquez ils ont été logiques en disant que c’est le MPSR qui poursuit la gouvernance. En plus, qu’ils respecteraient toujours le délai de la Transition établi sous le MPSR donc en quelque sorte c’est une rectification du MPSR sans changement pour l’essentiel. C’est le même régime qui se poursuit et on n’a pas fini la Transition si c’était après celle-ci on pourrait parler de renouer avec le régime militaire.
L’affrontement entre les deux camps ne va-t-il pas laisser des traces dans la cohésion au sein des FDS qui d’ailleurs était déjà mise en mal?
Non pas du tout. Parce que tout simplement ceux qui étaient face à face se connaissent bien. Dans l’armée, on obéit au chef donc si le chef dit de vous affronter, vous le ferez malgré vous. Mais une fois que le chef est parti, les soldats se retrouvent et fraternisent entre eux. Lors de la deuxième guerre mondiale, il y a eu des cas où les soldats russes et occidentaux ont fraternisé en l’absence de leur chef avant de reprendre le combat sous l’ordre de ces derniers). On avait deux camps, les forces spéciales avec à leur tête le président Damiba et les forces cobra avec le capitaine Traoré qui étaient face à face sous les ordres de leurs chefs respectifs. Dès lors que le chef a décidé d’abandonner, le conflit est fini entre les soldats qui fraternisent de nouveau. C’était de même avec Blaise Compaoré pendant l’insurrection, il y avait un côté le RSP et de l’autre l’armée qui se faisaient face. Mais quand on a dissous le RSP hormis ceux qui avaient été chassés de l’armée en 2011, les autres se sont retrouvés. Le vrai problème de cohésion au sein de l’armée c’est entre les sous-officiers, les jeunes officiers et la hiérarchie avec la liste des colonels, colonel-majors. Lors de la déclaration du capitaine Traoré, il a parlé des militaires qui deviennent milliardaires et ce problème existait depuis longtemps et existait quand Thomas Sankara venait au pouvoir. Il n’avait pas hésité à mettre beaucoup d’officiers supérieurs à la retraite. Je pense que le seul problème à régler c’est d’écarter les officiers supérieurs qui ploient sous le coup de leurs barrettes et qui ne sont plus efficaces pour l’armée mais qui ne sont là que pour nuire et empêcher de fonctionner normalement. Quand le capitaine Traoré a parlé de dysfonctionnement il dit qu’il y a des problèmes dans la lutte contre le terrorisme parce qu’il y a des officiers supérieurs qui empêchent cela parce que beaucoup d’entre eux sont liés au terrorisme et s’enrichissent avec le trafic et on ne peut pas le dire. Si vous avez remarqué, quand il y a eu l’attaque de Gaskindé, le ministre délégué de la Défense, Silas Keïta a dit qu’il y a eu des complicités. Depuis 2016, j’ai dit qu’il y a eu des complicités au sommet de l’Etat et un ministre avait contesté sous Roch Kaboré et c’est maintenant qu’ils viennent de connaître la réalité. Il y a des complicités au sein de l’armée qui font que la lutte contre le terrorisme n’aboutit pas. Ces gens qui sont en relation d’affaires avec les terroristes n’ont pas intérêt à ce que ça cesse et c’est ça qu’il faut briser, hors les jeunes officiers n’ont pas encore eu le temps de s’embourgeoiser mais ont l’enthousiasme de l’armée et de la chose militaire. Donc ils sont encore crédibles par rapport aux officiers supérieurs qui ont construit des villas, créer des affaires et n’ont pas intérêt à les perdre.
Le capitaine Ibrahim Traoré a promis des assises nationales qui vont désigner un nouveau président civil ou militaire. Si vous avez à choisir, préfériez-vous un civil ou un militaire?
Moi, civil ou militaire cela m’est égal. Pour moi, la qualification importe peu mais ce qui compte c’est l’intégrité de la personne qui va venir au pouvoir. La charte pour moi c’est inutile mais plutôt la valeur de la personne qui compte. On a rédigé une charte sous la première Transition entre Michel Kafando et Zida après c’est allé en queue de poisson. Quand ceux-ci sont venus il y a eu une charte de la Transition et on a parlé de trahison et dès qu’on a adopté l’avant-projet de la charte de la Transition les assises nationales avaient déjà trahi et qu’elles rejettent le mandat gratuit et dans le fonctionnement du régime Damiba on a vu que ça allait contre cette charte. Les textes, c’est bien pour encadrer mais ce qui compte le plus c’est la moralité, l’intégrité et l’honnêteté de celui qui est au pouvoir et même sans texte il peut gouverner selon les aspirations du peuple.
Parlant d’intégrité avez-vous un nom dans vos petits papiers?
Bien sûr, il y en a plusieurs qu’on pourrait citer, mais je ne veux pas qu’il y ait un braquage et des suspicions sur mon propos. Il y a plein de gens intègres dans ce pays mais les gens ne les remarquent pas. Les gens intègres ne supportent pas les intrigues ; c’est pourquoi lors des assises ils préfèrent s’éclipser et on se retrouve à prendre toujours ceux qui excellent dans les mauvaises pratiques. Pour la première Transition, pour le choix des représentants de la société civile, des gens se sont battus au centre de presse Norbert Zongo, pas pour servir le pays mais pour se servir. L’un des critères pour éviter ce spectacle désolant et avoir des hommes et des femmes honnêtes c’est de dire que tous les mandats sont gratuits. Si vous dites par exemple que le mandat de député est gratuit c’est en ce moment que vous allez commencer à voir des gens de valeur se révéler. Sous la deuxième République les gens ont conservé leurs salaires de leur corps d’origine en se contentant des indemnités de session. Thomas Sankara s’était contenté de son salaire de capitaine d’infanterie et les ministres de celui de leur corps d’origine avec des indemnités.
On a déposé Roch Kaboré pour incapacité dans la lutte contre le terrorisme, ensuite le lieutenant-colonel Damiba pour les mêmes raisons. Quelle garantie avons-nous que la nouvelle donne produise les effets escomptés?
J’ai donné la solution depuis longtemps, mais on ne m’écoute pas. La première des choses, c’est de mettre les camps militaires hors de nos villes et les rapprocher du théâtre des opérations. Le droit international humanitaire même interdit des camps militaires en ville. Nous avons, entre autres, le camp Babassy, le camp Lamizana, en pleine ville. En cas d’attaque c’est catastrophique. Vous avez vu dans cette crise où des unités militaires ont failli en arriver à l’affrontement on l’a échappé belle. Le chef d’Etat-major doit s’installer au Nord où au Sahel tout près des troupes. Ensuite, il faut faire assurer la défense du peuple par lui-même par la distribution des armes. Je vois déjà des gens pousser des cris d’orfraie qu’il y aura des règlements de compte. Sous la révolution le peuple était armé et chaque CDR (Ndrl) avait une branche militaire ; il peut y avoir quelques débordements mais aujourd’hui la Nation se bat pour sa propre survie. En Suisse, tout le monde est armé; elle n’a pas d’armée régulière mais une armée populaire qui est une des plus puissantes au monde. C’est pourquoi elle a les moyens de défendre sa neutralité, sinon il ne suffit pas d’être neutre. La Belgique, l’Autriche, la Hollande sous la deuxième guerre mondiale qui ont été envahies par Hitler. Les gens refusent d’armer le peuple pour ne pas lui donner une certaine autonomie vis-à-vis du pourvoir politique. Pourquoi le redoutable Ladji Yoro est mort? Mystère. Imaginé si dans chaque zone on un combattant de sa trempe allions-nous peiner comme c’est le cas actuellement devant ces assoiffés du sang des innocents? Non et non. Nous avons peur de donner réellement le pouvoir au peuple. J’étais une des rares personnes à soutenir haut et fort les groupes d’autodéfense Koglweogo qui ont fait reculer l’insécurité dans beaucoup de localités même si des bavures n’ont pas manqué. Je ne pense pas qu’ils en ont commis plus que la police. En effet, combien de gens sont morts en garde à vue au Burkina? Les Koglweogo bien encadrés pouvaient être une police de secours pour le pays. Y a-t-il une garantie pour que ce nouveau pouvoir ne tombe pas dans les chantiers battus? Damiba n’avait pas une ligne de conduite ; ceux qui ont été dans sa gouvernance y ont décelé des manquements à corriger avant de remettre en cause le système Damiba ; je pense qu’il ont élaboré un meilleur plan. Le capitaine a même dit qu’il est resté une semaine avec Damiba pour le convaincre de changer de ligne ; ce qu’il a refusé. Ils ont donné leur parole d’honneur de se limiter à leur principale mission, la lutte contre le terrorisme afin de redonner aux déplacés leur dignité. Ils ont même dit que le mandat de la CEDEAO est trop long pour eux, que les choses pourraient entrer dans l’ordre avant.
Damiba tombé on se remet à épiloguer sur les organes de la Transition ; selon vous lesquels sont indispensables?
D’abord, il faut des organes moins budgétivores et plus efficaces. Il faut donc en limiter le nombre. Que le président gouverne par ordonnance car les meilleurs moments de notre gouvernance ont été ceux où il n’y pas eu d’assemblée nationale. En deux ans seulement sans assemblée nationale le président Saye Zerbo a construit l’université de Ouagadougou et d’autres établissements secondaires dans les départements et même d’autres structures administratives comme les préfectures pour rapprocher l’administration des administrés. C’est encore lui qui a commencé la salubrité publique avec les nettoyages de nos cadres de vie. Et que dire de Sankara en quatre ans ? Nos pays ont besoin de despotes éclairés, car le système démocratique pratiqué actuellement est le résultat du parcours des Occidentaux ; il faut qu’on trouve notre voie si on veut avancer. Eux, ils sont passés par l’exécution de leurs rois et des réformes successives. Actuellement, on ne parle même pas de développement mais de jeter les bases de notre survie. Le problème d’eau et pour les hommes et pour les animaux, les problèmes de voirie, de salubrité publique… C’est pourquoi il faut un despotisme éclairé et non la démocratie actuelle. Il faut que la qualité de nos dirigeants se base sur la vertu, l’intégrité, la moralité et l’honnêteté.
Quel piège le capitaine du navire burkinabè devrait-il éviter pour conduire sa barque à bon port?
Il lui faut éviter tout de suite les courtisans qui vont se multiplier immédiatement. Il faut qu’il les transcende en ayant la capacité de les écouter sans les écouter. Sans un esprit de discernement pour distinguer le bon du mauvais dans son entourage ce sera difficile pour lui de réussir. Avec un cap à suivre c’est facile car il ne fonctionnera qu’avec ceux qui marchent dans cette vision. Pour imprimer sa marque, il doit au fur et à mesure écarter ceux qui ne peuvent pas suivre son rythme comme c’était le cas pendant la révolution. Bouger avec ceux qui bougent.
Parmi les nombreux soutiens au nouveau régime figurent les partisans d’une coopération avec la Russie et pour le départ des Français ; êtes-vous de cette catégorie?
Je ne suis pas de ceux-là, je suis pour la diversification mais pas pour le départ de X ou de Y ; ce qu’il faut c’est la banalisation de notre partenariat avec la France pour qu’elle ne soit pas dominatrice. Aller avec la Russie, c’est un exemple de diversification de nos partenaires ; pour autant, il ne faut pas aller se lier à la Russie et brimer nos intérêts. La Russie est plus exploiteuse que la France ; demandez des nouvelles à la Somalie, à l’Ethiopie et à l’Angola, ils vous le diront. Les Américains soutenant Israël, l’Egypte sous Nasser s’est retourné vers la Russie. Il a fallu que Sadat rompe les relations avec la Russie en renvoyant ses coopérants par milliers pour avoir les mains libres en 73 et s’attaquer à l’Israël. L’emprise de la Russie sur ses partenaires est beaucoup plus importante ; ceux qui réclament ce pays à cor et à cri ignorent cela et veulent qu’on chasse la France. Beaucoup sont de bonne foi car ignorants et victimes de la campagne d’intoxication en cours. Mais certains vivent des financements des lobbies prorusses et ça aussi c’est bien connu. Moi qui vous parle, j’ai fait Moscou comme bien de compatriotes. Hier comme aujourd’hui, le sort des Noirs y est moins reluisant qu’en France ou dans n’importe quel pays de l’occident. Si la Russie finance des gens pour mener une politique en faveur de ses intérêts c’est tout à fait normal, mais il nous revient de faire attention et défendre aussi les nôtres loin des émotions.
Interview réalisée par
Abdou Karim Sawadogo
Félicité Zongo
Roukiétou Soma (L’Observateur Paalga)