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"Le système multilatéral de l’ONU menace de s’effondrer" - Anne-Cécile Robert
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
« Le système multilatéral de l'ONU menace de s'effondrer » - Anne-Cécile Robert - Élucid
Les organisations internationales sont d'abord ce qu'en font les États. La journaliste et directrice adjointe du Monde diplomatique, Anne-Cécile Robert, publie Le défi de la paix. Remodeler les organisations internationales chez Armand Colin, un livre dans lequel elle analyse les atouts et les inconvénients du « système des Nations Unies » et réfléchit à comment le pérenniser tout en l'améliorant.
Laurent Ottavi (Élucid) : Quelle est l'origine des organisations internationales, et qu'a représenté la Seconde Guerre mondiale dans leur histoire ?
Anne-Cécile Robert : Elles sont nées au XIXe siècle. Les relations internationales étaient jusqu'alors organisées autour de conférences intermittentes, ponctuelles en fonction des enjeux. L'idée est alors née de pérenniser les relations entre États par des procédures et des règles connues à l'avance, autrement dit par une structure. Il s’agit d'habituer les États à la coopération pour mieux désamorcer d'éventuels conflits et tensions susceptibles de dégénérer en guerre.
Le choc de la Seconde Guerre mondiale, avec ses dizaines de millions de mort et les crimes inouïs par leur ampleur qui l'ont caractérisée, a intensifié et accéléré la volonté de pérenniser des structures de coopération internationale. Il fallait, pour ce faire, prendre en compte les évènements qui s'étaient produits et tirer le bilan des précédentes structures comme la Société des Nations. De nouvelles règles, de nouvelles institutions, de nouvelles procédures et de nouveaux traités ont ainsi été conçus pour définir de nouvelles normes, notamment en matière de droit de la guerre et de droit humanitaire. Les organisations internationales créées après 1945 visent à canaliser les risques d'explosions guerrières et à éviter la répétition du pire.
Élucid : En quoi les organisations internationales fondées en 1945 sont-elles caractérisées par un mélange d'idéalisme et de pragmatisme ?
Anne-Cécile Robert : Il serait utopique de penser supprimer les logiques de puissance et éradiquer la guerre. Les organisations internationales de 1945 entendent donc pragmatiquement fixer des cadres et des garde-fous par des mécanismes d'apprivoisement de la puissance. Le Conseil de sécurité fait partie de ce dispositif. Il est souvent critiqué à cause du droit de véto des cinq membres permanents, mais il a l'avantage de reconnaître en même temps la réalité des puissances (c'est l'aspect pragmatique) et de fixer un cadre à l'exercice de la puissance dans l'espoir de créer des comportements plus coopératifs (c'est l'aspect idéaliste).
En d'autres termes, le Conseil de sécurité reconnaît aux puissances leur privilège, car il est impossible de la leur retirer faute de moyens suffisants, tout en leur demandant de l'exercer au nom de l'intérêt commun, au nom de la Charte de l'ONU, et de la mettre au service des valeurs que ces puissances s'engagent à respecter. La dialectique entre idéalisme et pragmatisme fonctionne plutôt mal aujourd'hui, mais de nombreux cas, par exemple du temps de la Guerre froide avec la crise des missiles de Cuba de 1962, attestent de réussites passées.
Je tiens à souligner par ailleurs la fonction trop ignorée d'agora et de tribune jouée par l'ONU. Ce forum où les États (pratiquement tous les États de la planète) peuvent se retrouver pour discuter et négocier, permet de mieux se connaître, de désamorcer des crises et de faire émerger des questions. Les Nations Unies ont ainsi porté les revendications de décolonisation dans les années 1950-1960, ou encore la condamnation de l’apartheid. Elles ont été le cadre de beaucoup de négociations majeures en matière de désarmement ou d’environnement.
« Les Américains sont régulièrement mis en minorité à l'Assemblée générale. Ils détestent cette position et font tout pour éviter d’être mis en minorité lors des votes. »
Les institutions de 1945 respectent la souveraineté, mais lui fixent des limites. Est-ce une autre manière de dire la même chose ?
La souveraineté est un incontournable, une donnée de fait, car les États ne vont pas l'abandonner au nom du bien commun. Il faut donc reconnaître ce principe, et l’attention est prêtée à le reconnaître aussi aux petites nations. La charte des Nations Unies de 1945, signée par une cinquantaine d'États, anticipe ainsi la décolonisation. Une structure, le Conseil de tutelle, prévoit l'accès à la souveraineté des États colonisés.
Certains États demeurent cependant évidemment « plus souverains » que d'autres étant donné le décalage de puissances. La souveraineté des États-Unis a plus de moyens de s'imposer par rapport à celle du Burkina Fasso ! Juridiquement, par contre, les deux pays sont égaux. À l'Assemblée générale de l'ONU, la voix du Burkina pèse autant de poids que celle des États-Unis. C'est pourquoi les Américains sont régulièrement mis en minorité à l'Assemblée générale. Ils détestent cette position et font tout pour éviter d’être mis en minorité lors des votes. Ce qui souligne l'importance de cette égalité d'expression des puissances permise par les institutions de 1945.
La Russie aussi, depuis qu'elle a agressé l'Ukraine, a tout fait pour empêcher les condamnations à l'Assemblée générale de l'ONU alors que sa puissance militaire pourrait la conduire à ne pas s'en préoccuper.
Ce que vous venez d'expliquer rejoint-il ce que vous appelez dans votre livre « la pression sociale » ?
C'est la grande innovation de l'ONU. Elle essaie de créer une ambiance qui pousse les États à s'autodiscipliner, à saisir que leurs intérêts bien compris nécessitent de jouer le jeu de la coopération internationale. C’est pourquoi les États-Unis ont eu l'intelligence de pousser à la création de l'ONU en 1945, alors qu'ils étaient la première puissance du monde et auraient pu imposer une pax americana.
Les organisations internationales leur ont permis d'avoir un outil d'équilibre, un cadre qui organise leurs relations avec les Soviétiques et aussi qui assure un minimum d'ordre afin d'éviter d'avoir à jouer le gendarme partout. Même la plus grande des puissances a intérêt à avoir un minimum de structures !
Ce cadre auquel les puissances ont intérêt est très vaste en l'occurrence. Qu'appelle-t-on « le système des Nations Unies » ?
L'ONU est une organisation universelle qui a créé des sous-organisations. Elle est une sorte de matrice. Elle se décline en effet en programmes, en agences, en général spécialisées comme l'Organisation mondiale de la santé (OMS), tous destinés à résoudre des problèmes spécifiques ou à organiser des coopérations régionales (en Asie, en Afrique). L'Union européenne et l'Union africaine reconnaissent ainsi la Charte de l'ONU comme étant celle qui les encadre.
Le système des Nations Unies permet d'apporter de l'aide alimentaire, de vacciner des enfants, et de réguler toutes sortes de problèmes en matière environnementale. L'ONU a adopté des traités sur la protection des océans, sur la régulation de l'intelligence artificielle et sur beaucoup d'autres sujets.
« Quand on se passe de la règle du jeu, la force seule triomphe. »
Vous avez décrit ce qui a été fondé en 1945. La situation géopolitique est bien différente aujourd'hui, au temps de l'intelligence artificielle et des technologies et aussi de ce que vous appelez « l'exacerbation décomplexée des logiques de puissances ». Les circonstances actuelles menacent-elles de détruire le multilatéralisme ?
Après la chute de l'URSS, les États-Unis ont commis un abus de pouvoir en Europe centrale et orientale. Ils ont profité de la faiblesse de la Russie pour étendre l'alliance atlantique, enfreindre la charte de l'ONU au Kosovo en 1999 et commettre l'invasion illégale de l'Irak en 2003. Depuis une vingtaine d'années, la concurrence entre les puissances s'intensifie et la solution qui y est trouvée est l'affirmation de la force au détriment de la règle du jeu fixée en 1945.
Cette tentation de la guerre a des origines économiques et géopolitiques. La mondialisation libérale ne réussit plus aussi bien qu'avant et les États-Unis se sentent en perte de vitesse, tandis que des pays comme la Chine cherchent à consolider leurs avantages, voire à conquérir des positions de force. Nous en sommes arrivés à un tel point que le système multilatéral menace de s'effondrer. Je crains qu'on ne mesure pas ce que cela signifie.
Je pense que certaines puissances se disent que le système tiendra malgré tout ou qu'on pourrait s'en passer. J'entends aussi des commentateurs, des journalistes, des chercheurs dire que l'ONU a fait son temps, qu'autre chose surgira à sa place et qu'il faut écraser par la force les régimes illibéraux. Ces visions sont illusoires et dangereuses. Un cadre qui s'effondre, dans un contexte où il y a autant d'outils de puissances, ne peut que générer des guerres : déjà, la Russie agresse l'Ukraine, le Moyen-Orient est en feu, des conflits dans la corne de l'Afrique sont totalement hors de contrôle et la Syrie continue de brûler. Quand on se passe de la règle du jeu, la force seule triomphe.
Du côté des Occidentaux, le triomphe de la force ne s'explique-t-il pas en partie par une certaine amnésie ?
Nous avons oublié ce qu'il nous en a coûté la dernière fois que nous avons donné libre cours à ces logiques de force. Il y a un double problème de perte de culture historique et de mémoire. Les générations d'après-guerre parlaient des bombardements avec crainte, car elles les avaient vécus. Le temps a passé depuis, sans supprimer totalement les souvenirs. À partir des années 1990, on ne disait plus « bombardement », mais « frappe » comme pour atténuer la réalité.
Avant de recourir à la guerre, de nombreuses méthodes diplomatiques et pacifiques sont pourtant possibles, que je détaille dans un chapitre de mon livre. Nous sommes rarement dans l'Histoire dans des situations similaires aux années 1930 avec un Hitler en face de vous. Or, aujourd'hui, la force est réhabilitée comme outil premier de règlement des problèmes. Elle peut éventuellement avoir des effets positifs à court terme, mais elle crée surtout d'autres problèmes, des morts, des destructions, du ressentiment qui génère d'autres guerres, et rien de solide et de bon ne se fonde sur elle.
« Contre les logiques de force, je plaide pour une ingénierie de la paix. »
Ceux qui ont fondé les organisations internationales de 1945 en avaient conscience, car ils avaient vu à l'œuvre les logiques impériales et coloniales et les crimes de l'Allemagne nazi. Chaque fois qu'on avait terminé une guerre sans se soucier de l'équilibre, comprenaient-ils, on avait préparé la suivante. Celle de 1914-1918 – conclue sur un déséquilibre des frontières sans tenir compte des logiques culturelles et de ce que pensaient les populations – est particulièrement révélatrice de cette mécanique mortifère. J'ai écrit ce livre pour contribuer à la bataille culturelle. Contre les logiques de force, je plaide pour une ingénierie de la paix.
Vous évoquez cependant dans votre livre des tendances contradictoires. La tentation de la force qui met en péril l'architecture multilatérale va de pair avec un appel au multilatéralisme. Pouvez-vous décrire cette tendance opposée ?
Nous vivons une période d'entre-deux et la partie n'est pas encore jouée. La logique de la force s'affirme, mais il y a aussi des tentatives de freiner tout cela, par exemple avec les stratégies divergentes des puissances moyennes ou encore des coalitions de petits États à l'Assemblée générale de l'ONU. Ils font voter des textes, arrivent parfois à faire passer des choses, y compris au Conseil de Sécurité. Les membres non permanents du Conseil de Sécurité ont ainsi imposé un couloir humanitaire en Syrie alors que la Russie et les Américains étaient bloqués sur le sujet depuis plusieurs mois.
L'Union africaine essaie aussi d'imposer des limites aux puissances. Un petit pays comme le Liechtenstein, qui a créé une coalition autour de lui, a réussi à imposer aux 5 membres permanentes l'obligation de venir se justifier de leur recours à leur droit de véto devant l'Assemblée générale. Il faut maintenant que les citoyens, à leur tour, se saisissent de ces enjeux et fassent pression sur leur gouvernement. Pendant la Guerre froide, il existait des mouvements pour la paix. Ils semblent atones aujourd'hui.
« L'incapacité de l'Occident à respecter la Charte de l'ONU alimente les accusations de deux poids deux mesures. »
Une autre dimension de la situation géopolitique actuelle est l'isolement de l'Occident. En quoi la guerre en Ukraine et le conflit israélo-palestinien l'ont-ils souligné ?
Après l'agression de l'Ukraine, les pays occidentaux se sont montrés particulièrement unis, notamment pour imposer des sanctions à la Russie. Quand on regarde pourtant le détail des votes à l'ONU, cette unité se paie d'un isolement. Certains pays s'abstiennent, d'autres votent les résolutions, mais n'appliquent pas les sanctions.
L'incapacité de l'Occident à respecter la Charte de l'ONU qu'elle demande de faire respecter à la Russie jette le doute sur sa morale, sur sa sincérité et alimente les accusations de deux poids deux mesures. L'Occident perd d'autant plus en autorité morale qu'il est incapable de dire à Israël d'arrêter ses massacres à Gaza et au Liban. Les pays occidentaux utilisent des mots bien plus faibles pour Israël que ceux utilisés par rapport à la Russie. Le deux poids deux mesures fait le tour du monde, tout comme les images de Gaza.
Le ressentiment contre l'Occident ne tient-il pas aussi à des facteurs historiques chez des dirigeants plus soucieux de l'histoire de leurs pays, que ce soit la mémoire de colonisations ou de guerres ?
Je ne sais pas si le passif colonial joue autant que certains le disent. Par contre, l'idée est toujours plus répandue d'en finir avec la domination de l'Occident sur les relations internationales. Ce n'est pas seulement du ressentiment. D'autres pôles culturels, économiques et de civilisations demandent légitimement plus de place. Ils ne veulent pas forcément remplacer les Occidentaux, mais rééquilibrer les choses, à la faveur de l'Afrique, de l'Asie, de l'Amérique latine.
L'Occident dit « l'universel, c'est moi ». Il projette sur l'universel ses valeurs à lui. Il parle ainsi de « communauté internationale » là où il n'y a que les États-Unis et leurs alliés. Il n'existe pas de communauté internationale au sens d'une très grande cohérence sur le plan des aspirations ou des valeurs, du partage d'un même destin, d'une histoire, d'une même projection dans l'avenir. Il y a en revanche aujourd'hui une société internationale avec des États capables de s'entendre sur des règles du jeu. L’enjeu est désormais, comme je l’explique dans mon livre, d’« universaliser l’universel », c’est-à-dire de permettre à tous de contribuer à l’élaboration des grandes règles du monde dans le respect des valeurs de la Charte de l’ONU.
« Quand les organisations internationales ne sont pas à la hauteur, c'est surtout parce que les États ne remplissent pas leur rôle. »
Quelles sont les critiques les plus justifiées faites aux organisations internationales ? Sont-elles toutefois excessives ?
Quand on regarde certains conflits qui n'en fissent pas, comme la Syrie, l’Ukraine, Gaza et le Soudan, il est vrai que les organisations internationales peuvent se montrer inefficaces. Mais le reproche est parfois injuste, car elles parviennent à contrôler certains conflits, à accompagner la sortie de la guerre comme en Mozambique ou en Namibie. Quand les organisations internationales ne sont pas à la hauteur, c'est surtout parce que les États ne remplissent pas leur rôle. Au Proche-Orient, l'Assemblée générale, le Secrétaire général de l'ONU font bien leur travail, mais le Conseil de Sécurité est bloqué par les États-Unis tout seul. Il s’agit donc d’un problème politique et non pas institutionnel.
Parfois, les organisations internationales pèchent aussi dans leur communication concernant les valeurs. La valorisation de minorités sexuelles est critiquée en Afrique et en Asie par exemple. Récemment, des programmes d'aides du FMI ont même été conditionnés à la reconnaissance de droits pour les LGBT. Cela correspond à des valeurs très importantes chez nous, mais elles sont très clivantes dans d'autres parties du monde.
Quels sont les axes d'action qui permettraient d'éviter la fin du système des Nations Unies, et à la prophétie de l'ambassadeur d'Israël sur la fin de l'ONU de s'accomplir ?
Les organisations internationales sont intergouvernementales, donc elles reposent sur les États. S'ils ne jouent pas le jeu ou n'y croient plus, elles ne peuvent que se déliter. On a en l'occurrence de quoi douter de l'engagement de certains pays, notamment celui des grandes puissances créatrices de l'ONU. Les États-Unis ont-ils encore envie de respecter l'ONU quand ils sont incapables de faire respecter ces règles au Proche-Orient ? Des pays disent aussi ouvertement que l'ONU est un frein à leur intérêt. C'est le cas d'Israël qui menace l'ONU et prédit son effondrement.
Ce scénario n'est pas le seul possible toutefois. Le dernier sommet de l'ONU, le Sommet de l'Avenir à New York, où tous les États étaient présents, ce qui n'était pas gagné d'avance, montre qu'il demeure une volonté de dialogue. Aucune grande décision n'en est sortie, mais il a été réaffirmé que l'ONU devait continuer à vivre. Pour parvenir à cet objectif, elle devra à mon sens s'adapter aux recompositions géopolitiques et être plus représentative des différentes parties du globe. Elle reflète aujourd'hui l'ordre de 1945, ce qui n'est plus défendable. Les États-Unis ont fait un pas en avant en se prononçant pour que l'Afrique ait un ou deux membres au Conseil permanent de Sécurité, certes sans droit de véto, mais quand même.
L'ONU devra aussi mieux prendre en compte les inégalités de richesse. Les institutions financières internationales fonctionnent aujourd'hui comme un club de riches, dominés par les Occidentaux qui imposent leurs règles économiques au reste de la planète. Il faut rompre avec ces vieux schémas sans tout recommencer à zéro, c’est-à-dire qu’il faut reconstruire l’ordre international à l’intérieur du cadre créé par l’ONU dont les règles de base sont toujours pertinentes.
Propos recueillis par Laurent Ottavi.